About this piece.
Il est difficile d’exprimer les sentiments que j’ai eu pendant les séances de pose — pour le bonne raison que je ne m’en souviens plus très bien. J’étais en effet le premier dont Alan a voulu faire le portrait. Et cela remonte déjà à quelques années. En outre, conscient que poser ne m’enthousiasmait pas beaucoup, Alan avait eu la gentillesse de me permettre de lire un livre.
J’avais donc l’esprit ailleurs. Le résultat est que — avec les yeux apparemment clos et le ton grisâtre que le peintre a mis sur mon visage — ce portrait de moi me fait penser à un masque mortuaire qui annonce probablement l’état dans lequel on pourrait bientôt me contempler.
Franchement, cela ne me plaît pas trop. Par conséquent, je préfère évoquer le plaisir que j’éprouve chaque fois que je rencontre Alan qui, outre ses indéniables qualités d’artiste, est un hôte d’une grande générosité et d’une grande délicatesse.
J’ai rarement l’occasion de passer des soirées si riches en sujets de conversation, allant de la politique à la religion, tous les sujets que la bienséance interdit et qu’Alan a le talent de nous faire aborder avec le plus grand détachement — ainsi que la plus remarquable compétence.
J’ai en effet rarement rencontre une personne d’une réflexion aussi personnelle et riche, sans parler de l’étendue de sa culture et de la sûreté de son goût. Oui, il devait sans doute savoir ce qu’il faisait lorsqu’il a tiré mon portrait.
Bernard Stevens